La Brasserie Barbès, repaire hispter au cœur du 18ème
Inaugurée au printemps 2015, la Brasserie Barbès fait couler beaucoup d’encre depuis son ouverture. En décalage avec le quartier et trop chère pour les uns ou brasserie populaire et moderne pour les autres, une question demeure : on y mange comment, à la Brasserie Barbès ?
Après un incendie et deux ans de travaux, l’angle du boulevard Barbès et du boulevard de la Chapelle est enfin réhabilité. Suite à l’incendie qui a ravagé le magasin discount Vano en 2011, les serials gentrificateurs Pierre Moussié et Jean Vedreine (Le Mansart et Le Sans Souci à Pigalle pour Jean, et Chez Jeannette et Le Floréal pour Pierre) ont finalement eu l’accord pour reprendre le fond de commerce, passé in extremis sous le nez de KFC qui était aussi intéressé par cet endroit bien placé.
En face du métro Barbès Rochechouart, entre les vendeurs de clopes à la sauvette et les magasins bon marché, se dresse fièrement un tout nouveau lieu. Flambant neuve, tout de blanc immaculé vêtue, la Brasserie Barbès attire l’œil – et les critiques des médias comme des riverains : « (…) avec sa carte prohibitive et ses airs de refuge pour gens bien nés, la Brasserie Barbès fait tâche dans l’un des quartiers les plus pauvres de la capitale. » pour les Inrocks, « (…) bâtiment (…) ressembl[ant] à un bug dans Sim City : il n’est pas à sa place. » pour Slate.fr, ou encore « C’est beau, (…) mais peut-être un peu trop. Ça sonne faux là dedans. » comme en témoigne une habitante du quartier pour le webzine Retard. Cependant, d’autres ont été conquis par le concept, à l’instar de Télérama (« authentique café “parigot” »), Le Parisien (« le nouveau temple de la « branchitude » ») ou encore Le Fooding.
Et en effet, le lieu est très beau, et combine astucieusement modernité et codes bistrotiers. Sur trois étages et 600 m2, nous trouvons au rez-de-chaussée une grande salle dont une partie terrasse pour la brasserie/café. Le premier étage est divisé en deux : d’un côté un restaurant avec de grandes baies vitrées, de l’autre un patio (fumeur) avec toit ouvrant. Le deuxième étage comporte une rotonde vitrée réservée pour la partie bar-dancing ainsi qu’un roof-top avec transat et plantes vertes, qui n’est toujours pas ouvert au public (malgré une communication en grande pompe autour de ce toit-terrasse).
C’est beau, sympa, pas si grand, très bruyant et ça brasse du monde (préparez-vous à attendre).
Le service est sympa, serveurs « à la cool » malgré leur tenue de brasserie chic, quoique légèrement familiers pour certains. La carte est relativement courte et classique, beaucoup de plats traditionnels (côte de bœuf, coquelet laqué, carré d’agneau, tartare de bœuf, burger) sans grande originalité, pas vraiment adaptés pour la saison (ici l’été). Pour ceux qui on envie de légèreté ou de verdure, pas de chance, une seule et unique salade est proposée pour le dîner.
Salade de mâche, pois chiches frits, piquillos au fromage frais, olivettes, raisins blonds, câpres, artichauts, faisselle de chèvre et graines de tournesol
Généreuse et joliment dressée, cette salade est appétissante et originale. Goûteuse et fraîche, elle est parfaite pour les jours d’été. C’est une bonne surprise, et elle change des sempiternelles salades du cantal, de chèvre chaud ou encore du chef (au choix). Petit incident pour la salade dont il manquait un ingrédient (les artichauts), chose rectifiée après s’être fait gentiment taquiné par le serveur (à 14 € la salade, oui, on aimerait que tous les ingrédients soient présents).
Choux praliné, amandes caramélisées
Carte des desserts assez courte (6 choix) et peu de desserts à l’assiette mais plutôt des desserts de type boutique, à l’image de ce chou façon Paris-Brest-sans-le-trou. Tout comme les plats, la carte est classique et les desserts pas vraiment légers (mille-feuille, tarte au chocolat, vacherin…) compte tenu de la saison. Dommage.
Le chou est très simple et assez gros, dénué de fioriture mais paré d’un petit napperon en papier désuet et pas pratique du tout. Le chou est fait maison et du jour, bien cuit, pas détrempé par la crème ni ramolli par un séjour prolongé au frais. Quant à la crème au praliné, elle est mousseuse et goûteuse, pas trop lourde ni trop grasse. Le tout est bon et frais. Par contre, la mention « amandes caramélisées » dans l’intitulé du dessert restera un mystère.
Les prix
Prix correspondants à une brasserie chic et tendance parisienne (indépendamment du quartier), c’est-à-dire :
Café : 2,40 €
Salade de mâche : 14 €
Plats compris entre 16 et 32 € pour le dîner
Desserts entre 6,50 € et 7 €
En résumé
Il y a la forme et le fond. La Brasserie Barbès à la forme d’un lieu tendance et hipster et le fond d’une brasserie assez conventionnelle, sympa mais pas exceptionnelle. La cuisine est bonne et fraîche, tout est fait maison et bien exécuté, on y mange bien.
Et pour rejoindre les critiques précédemment citées, le lieu dénote complètement avec le quartier (toujours l’un des plus pauvres de Paris, qui, malgré l’apparition de commerces tels le Louxor, La Grande Récré et Gibert, n’a pas l’air spécialement en pleine mutation, il est plutôt encore dans son jus), ce qui peut laisser un sentiment de malaise accentué par la présence de vigiles à partir de 18h. Si, en règle générale, la gentrification des quartiers se fait en douceur avec des commerces plus discrets et moins ambitieux, c’est raté pour la Brasserie Barbès, et c’est bien ça qui lui est reproché.
Informations pratiques
2, boulevard Barbès
75018 paris
Ouvert tous les jours de 8h à 2h.
Pas de réservation possible.